Fourth Dimension
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Le label nous rappelle que ce musicien japonais (Boredoms, Zeni Geva, Acid Mothers Temple…), excelle aussi bien dans les compositions comprimant le temps que dans celles qui le déploient en myriades d’images psychédéliques. A l’écoute de cette première œuvre solo qu’il m’est donné d’entendre, cette faculté se confirme et je ne tarde pas à tracer des parallèles avec l’œuvre réellement protéiforme qu’est / fut celle de Tuxedomoon, dont la musique se construit d’allongements tout autant que de cristallisations subites. Le jeu de Tabata est varié, large et panoramique et cependant l’ensemble des sept compositions qui constituent l’album fait corps, s’articule en éléments d’un même organisme. Les cordes effondrées, les basses vrombissant dans le terreau d’effets électroniques analogiques, les synthétiseurs, font à eux tous surgir à la vue un cosmos coloré et paradoxalement souterrain, pareil à une révélation de gemmes au fond de la mine. Tout ensemble, Cabaret Voltaire et Hawkwind laissent paraître leur influence et l’on cessera ici la recherche de filiation car elle n’a que peu d’intérêt dans ce qu’il faut considérer comme la participation aboutie, encore que risquée, à un exercice maximaliste dans les gestes mais volontairement sobre dans l’expression rendue. Dans ce crépitement proto-mélodique, dans le magma des cordes effondrées et des touches envolées, de place en place des plages de sérénité rutilante viennent au jour, à l’image du troisième titre, I miss you, où la clarté efface pour un temps l’effilochement, sans pour autant le nier, car il est clair que de tels moment en sont nés, qu’ils y ont été préparés. On comprend alors comment ce jeu sur le temps est possible ; il l’est, comme dans la vie de l’esprit, par la combinaison de la nature des sensations et de l’expérience du paysage, du rythme, de la respiration. C’est tout entier un disque de la maturité musicale.
Denis Boyer
2010-12-20