Sound On Probation
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Multiple comme les musiques qu’il aime, celle de Laurent Perrier se décline sur tous les niveaux d’expérimentation qu’il parcourt, d’oreille et de main. Dans Zonk’t par exemple, c’est cette électro dub, down tempo et stupéfiante. Chaque disque en constitue une variation, dessinant dans diverses proportions les silhouettes de Scorn, Coil ou Vladislav Delay. Cette fois, se rapprochant de ses exercices plus arides sous d’autres alias, Laurent Perrier fait sa musique plus sèchement hypnotique encore, renouant peut-être involontairement avec une tradition industrielle qui l’a longtemps accompagné. Le rythme, la pulsation dont il est question dans le titre de l’album, ressemble plus souvent au tambour asséché de quelque maître de galère ou à la métronomique alerte d’un vaisseau en perdition qu’à la boîte chromée attendue. Les sifflements, les feulements de la machine, habillent la cadence de fumées que l’on devine toxiques tant leur chaleur et leur acidité imaginées suivent de près cette impression de machinerie désertée par toute humidité. Le talent ici, réside en particulier dans l’étrange dichotomie creusée entre cette dureté climatique et la souplesse de l’exécution, les belles torsades de boucles, la forme voluptueuse que prennent les sifflements mortifères. Les contraires s’accordent dans une articulation rendant tendons et cartilage à un squelette que l’on aurait cru menacé d’ankylose. La chaloupe se fait d’avant en arrière, la respiration loin d’épouser les sinuosités dub de la basse minimale, joue l’inspiration progressive puis le relâchement dans quelque fosse d’effondrement de volume, d’incubation du vrombissement en crécelle. Ainsi nourri de l’organe, le rythme gagne bel et bien la partie, s’insinue et gouverne, dans ses reliefs de détail, ses habillages floutés, jusqu’à l’imperceptible mouvement des doigts.
Denis Boyer
2010-01-18