Brume – L’Ombilic des rêves

taâlem www.taalem.com Si le titre de ce nouvel album de Brume fait directement référence à l’ouvrage L’Ombilic des limbes d’Antonin Artaud, c’est bien plus que pour se permettre un jeu de mots. Le prolongement d’un mode d’expression surréaliste a toujours caractérisé les travaux de Christian Renou sous le nom de Brume, et cet album ne fait pas exception. Si le rêve – et, partant « le fonctionnement réel de la pensée » – se trouve au cœur de cet album, c’est, suivant les notes de pochette, dans la version cauchemardesque, c’est-à-dire accotée au risque, à l’inquiétude, qui siéent à l’univers de Brume. Cette musique se veut comme un pendant du rêve, c’est-à-dire, et c’est en cela qu’elle atteint admirablement son but, qu’elle parvient à coudre ensemble des éléments décousus, en une créature composite. Un monstre musical, émouvant cependant, comme put l’être dans le roman de Mary Shelley le semblant d’humain créé par le moderne Prométhée. Un mutant […]

Lull – That Space Somewhere / Final – I Am the Dirt Under Your Fingernails

           Cold Spring Fourth Dimension www.coldspring.co.uk   C’est au moins depuis 1986 que les noms de Justin Broadrick et de Mick Harris sont liés, quand encore adolescents ils enregistraient à Birmingham en compagnie de Nick Bullen la première face du séminal album Scum de Napalm Death. On retrouve les trois musiciens ensemble en 1991 pour le premier album de Scorn, Vae Solis, et l’on mesure le chemin parcouru non seulement depuis Scum, mais aussi dans le déroulement même de l’album qui s’établit depuis un hardcore industriel, glisse vers un hommage aux Swans puis pose dans sa dernière partie les prototypes de « l’ambient dub » expérimental qui brillera sur les deux albums suivants (sans Broadrick) : Colossus et Evanescence. Mais au début des années 90, les noms de Broadrick et Harris sont souvent associés parallèlement à leurs projets rock – Godflesh et Scorn (Harris se trouve même batteur sur la tournée de Godflesh en 1991, Robert Hampson […]

MonoB vs NoroE (Marc Caro & Gaël Loison) – Exorganics

Unknown Pleasures Records https://hivmusic1.bandcamp.com/   Marc Caro, (MonoB) connu pour ses créations cinématographiques depuis Le Bunker de la dernière rafale en 1981, puis d’autres films en compagnie de J. P. Jeunet, dont Alien IV… est aussi le designer sonore du Bunker avec sa formation Parazite. Quant à Gaël Loison (NoroE), on ne compte plus ses projets musicaux – pour ma part, c’est Tank qui me vient spontanément à l’esprit – mais il est aussi concepteur de synthétiseurs modulaires. On ne trouvera pas ici d’exercices purement industriels ni de standards krautrock… mais pour autant ils ne sont pas absents de l’album Exorganics, non, car les tentacules, les palpes sont nombreux et, de la même manière que dans Geins’t Naït, c’est le corps musical complet qui demande attention, pas la forme isolée de ses composants. Exorganics, comme son nom semble l’indiquer, est un album dont les formes sont rejetées en surface pour laisser couler la texture. C’est dans […]

Michael Lightborne – Ring Road Ring (LP)

Gruenrekorder www.gruenrekorder.de   Michael Lightborne, artiste britannique, s’intéresse particulièrement aux sons des environnements, comme le montrent ses deux albums, tous deux publiés par le label allemand Gruenrekorder. Le premier, Sounds of the Projection Box, était construit naturellement autour de sons d’un appareil de projection, et celui-ci, Ring Road Ring, résulte d’un travail de récupération et de réinterprétation de sons du périphérique de Coventry, près de Birmingham. Un périphérique qui avait été conçu comme projet de délestage de la ville au profit de la circulation pédestre, et qui connaît aujourd’hui le sort de tous ces dispositifs, concentration de véhicules et dégradation de l’environnement. Michael Lightborne a capté différents sons aux pieds des piliers du périphérique, cette « ring road », les assemblant de manière presque brute sur la toute première pièce de la première face, pour ensuite utiliser les mêmes sources comme matériau d’un jeu plus poétique. Lightborne affirme avoir ressenti beaucoup de mélancolie dans la collecte […]

Cent Ans de Solitude – En concert, El Diablo Lille, France 29.11.14

Les Nouvelles Propagandes www.facebook.com/centansdesolitude Vétéran de la pratique d’une musique dite industrielle, Jean-Yves Millet s’est fait connaître sous le nom de Cent Ans de Solitude et avec son propre label Les Nouvelles Propagandes. Le terme de musique industrielle, tel qu’il a surgi à la fin des années 70 dans le sillage de Monte Cazazza et Thobbing Gristle a ensuite accédé à la postérité que l’on connaît, jusqu’à sa translation vers l’électronique pure ou le métal, mais cela montre aussi la vigueur d’un tel concept qui ne peut sans doute rester contraint aux seuls bruits de l’industrie détournés en œuvre musicale. Aussi bien pourquoi ne pas préférer pour nommer l’esthétique industrielle old school le terme de « musique futuriste » puisque son programme était défini bien avant les retombées du punk, avec L’Art des bruits de Russolo en 1913… On le voit, la musique industrielle ne peut longtemps rester enfermée dans les murs de l’usine, elle intègre et […]

Cent Ans de Solitude & Flint Glass – Sprengbagger 1010

Les Nouvelles Propagandes lesnouvellespropagandes@gmail.com   Un homme montre le déchirement existant entre la nostalgie de ses racines rurales et le progrès technique ravageur que ses talents d’ingénierie vont précipiter par la mise en œuvre de sa monstrueuse machine excavatrice. Voici le thème de Sprengbagger 1010, film de 1929, que Cent Ans de Solitude (J.-Y. Millet qui anime le label Les Nouvelles Propagandes depuis le milieu des années 80) et Flint Glass (G. Trémorin) ont éclairé de leur musique. La tâche est compliquée, on le sait ; créer l’accompagnement d’un film muet demande le respect scrupuleux non seulement de l’œuvre, mais aussi de son script, c’est-à-dire impose des rythmes et des densités, des tensions et des éclairages qui sont extérieurs et antérieurs à la musique. L’exercice exige dans le même temps une démarche assez originale pour ne pas se cantonner à la musique à programme, pavlovienne. En un mot une appropriation respectueuse. Sans avoir vu la projection […]