Antropik Sounds
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L’art de la réverbération est devenu depuis quelque temps autre chose qu’un accompagnement et c’est alors, dans un tel champ débarrassé d’événements rythmés et mélodiques, un devoir pour l’explorateur conscient que d’ouvrir un nouveau champ de paysage. Les plans, les perspectives, les strates doivent se déployer, révéler leurs dessins et leurs densités. Antropik, pseudonyme d’un musicien français, a intitulé son album Lanthanides, des corps décrits successivement dans le tableau périodique des éléments, dont le nom veut dire à peu près « rester caché » Il n’est peut-être pas insignifiant de se rappeler qu’on les appelait aussi terres rares. Rester caché : quel est l’outil de dissimulation dans ce travail ? On aurait tort de prendre ce chemin, c’est plutôt l’inverse que le musicien semble avoir parcouru : il a cherché à mettre au jour, à éclairer ce que le réservoir d’encre du vrombissement ambiant peut dissimuler. Les pans entiers de vibrations basses se trouvent alors relevés d’un rouge malade, tel celui que vomit lentement le volcan. Des harmoniques si serrés promettent une violence sourde, et le qualificatif doom est alors tentant. Quand ce tellurisme est contourné, dépassé ou survolé, d’autres matières instables font leur apparition, des notes éparses de basse semble-t-il, des fontaines d’anciennes pièces de métal fusible, et en vapeur un fantôme de fredonnement assourdi. Les sons synthétiques sont largement mis à contribution, tout comme chez Lustmord, et la comparaison s’arrêtera ici. Car tout cela répond bien à un rythme organique, à un mouvement d’exhalaison, d’accablement, d’épanchement et, à l’inverse parfois, d’impulsion vers le ciel, à la façon d’un regard, d’un souffle. Quand la lumière se respire.
Denis Boyer
2012-07-13