OPN Records / BKO Media
www.opn.fr
Après la nuit, avant que le jour ne prenne son tour, il y a ce moment indéfinissable dans le temps, aux frontières aussi floues que les silhouettes qu’elle dévoile et suggère : c’est l’aurore. Le duo parisien Materia Aurora s’est donné pour tâche d’en manifester en musique les lumières étranges (jusqu’à celles du pôle qui réalisent le merveilleux). Pour les inspirer, avant tout Biosphere, à qui ils dédient en partie le disque, mais aussi, on l’entend, Thomas Köner ou Paul Schütze (et ses voix mélangées d’air). Post night sequences est un album aussi varié qu’une telle multiplicité de tutelles peut le laisser imaginer. Et aussi baigné d’une même teinte, pour les mêmes raisons. Tout cela participe de l’adhésion revendiquée à un style, une école pourrait-on dire à présent, tant les musiciens cités définissent des codes communs, dans ce lieu sonore incertain où la grâce et l’harmonie précèdent la mélodie, et la pénombre la lumière. Materia Aurora use de synthétiseurs, de sons trouvés, de cordes, de quoi encore ? A ce point c’est sans objet, et la substance sonore parle pour elle. C’est le bleu, le gris, quand l’orange n’est que rêvé. Le bourdon joue sur les diffractions de la banquise figurée, l’écho de perd dans l’horizon, le bouillonnement se concentre en pépiement de percussions lointaines, le chatoiement se relève jusqu’au fredonnement. Le modernisme du chrome trouve une racine directe, comme s’il était né de la glace avant d’être reformé dans les usines. Le plein côtoie le délié, le lisse le filandreux. On ne s’étonne pas alors d’entendre des arpèges, ils participent comme tout le reste de la matière du rêve, et celui-là même peut prendre des aspects de vérité comme la musique informelle suffisamment mûrie se permet l’éclairage de la structure, de la séquence figurative, pareille à une juste inclusion minérale dans la roche.
Denis Boyer
2010-06-16