Glacial Movements
www.glacialmovements.com
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La poétique musicale des pôles, dont Glacial Movements est en train de patiemment publier une manière d’anthologie, prend certainement naissance dans l’œuvre de Thomas Köner. L’influence qu’il a pu avoir (ainsi que Lull / Mick Harris) sur plusieurs artistes de musique ambiante est profonde et féconde. Pour preuve l’album Solstice city de Skare, peut-être la sortie la plus discrète du label, mais tout aussi intéressante que celle des cathédrales que sont Lull, Rapoon, Oophoi et prochainement Thomas Köner lui-même, Francisco López et Paul Schütze. Tous, à leur manière, ont défini le courant froid du drone. Et le trio Skare n’est pas moins inspiré. Solstice city n’évoque pas la glace qui craque, mais plutôt la réfraction de la lumière sur la banquise, une lumière qui porte avec elle tout le panorama de la glace et du ciel. Le long souffle d’harmoniques qui mêle l’orange au bleu dans ce seul lieu de possibilité qu’est le drone, porte le vrombissement d’un avion qui survole la scène, très loin. Seule évocation de la présence humaine, il est submergé par cette fusion de l’air et de l’eau, cette ondulation en expansion. Sur elle, en elle, naissent de beaux filins droniques plus denses, et aussi, toute poésie, la note de piano comme goutte d’eau, tribut consenti par la banquise au soleil qui la fait chanter. Et puis, il y a ce vent froid, qui se fait gentil, polissant doucement la dure surface gelée, levant avec délicatesse la poudre neigeuse qui n’a pas fini de s’y agréger. La collaboration d’Enrico Coniglio, musicien vénitien, avec Oophoi est plus loin de la banquise en tant qu’expérience romantique. Si la lumière en réfraction y est bien présente, c’est plus sur les galets de silicone d’une electronica mâtinée de ce que l’on qualifie par ce bel oxymoron de modern classical. Les vagues d’harmoniques réfrigérés la parcourent et la plissent, et elles charrient en discrète quantité le click, la minéralisation que les labels Raster-Noton ou 12k ont érigée en joaillerie. Calme tangage d’un ressac anesthésié par le froid, l’ondulation synthétique est par endroits fractionnée par le rythme, projetant plus encore le lissé de la glace sur le métal poli. D’une grande beauté, ce pays des nuages trouble le regard mais rafraîchit l’ouïe, ouvrant le label Glacial Movements à d’autres métaphores du froid.
Denis Boyer
2009-09-26