Glacial Movements
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Il y a quelques années, Mark Warren, moitié de l’actuelle (et quasi inactive) incarnation de Zoviet*France, avait publié, sous le nom de Penumbra, le splendide album Skandinavien (Iris Light Records). Il y décrivait en musique un voyage vers et à l’intérieur des terres septentrionales. Les lumières y perçaient sous la forme d’ébauches mélodiques, les ponctuations de neige sous celle de formes rythmiques hypnotiques. Aujourd’hui, Alessandro Tedeschi alias Netherworld entreprend à son tour un voyage en terre arctique, une marche vers le Nord. Mais le froid et l’obscurité que précise le terme norvégien Mørketid le placent dans un territoire d’extrémité, et si le Nord est sa quête, elle sera celle éternelle à l’intérieur du Nord lui-même. Voix captées en radio, nappes glacées fluant et refluant, préparent aux beaux dessins du vent sur la neige fraîchement tombée. Plus loin, les boucles lumineuses d’harmoniques montrent la réverbération d’une faible lumière sur les motifs réguliers de la glace. Un cœur semble y battre, peut-être celui du musicien tenté de se laisser happer par le grand désert blanc. La proximité des thèmes de Thomas Köner et de Biosphere ne fait pas pour autant de Netherworld une copie des univers musicaux de l’un ou de l’autre. Bien sûr, il reprend à son compte les souffles de glace et les dessins proto-mélodiques. Mais là où le premier compose la mélancolie d’une banquise quasi désertique, où le second entreprend comme une traduction musicale de la complexe structure des flocons de neige, Netherworld se situe dans un territoire intermédiaire où précisément la pénombre suggère les formes plus qu’elle ne les dévoile. La musique de Netherworld est cette errance de l’homme dans le Nord, son regard sur les scintillements de millions de grains glacés en suspension (le fil cristallin à l’arrière-plan de la vague élégiaque s’étalant de proche en proche, sur le morceau titre de l’album, magnifie cette image). Les quelques voix flottantes, les pulsations travaillées de leur naissance à leur mise en boucle, forment les échos émouvants de cette recherche des contours incertains, de la belle nappe terminée dans le drone effiloché, du battement de cœur au fond de la parka. D.B.
D.B.