Sonoris / Metamkine
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La lettre isolée qui sert à intituler les albums et les morceaux de Kozo Inada n’a sans d’autre sens que celui de la classification, et le quasi anonymat de sa musique laisse à penser que le Japonais souhaite éviter toute correspondance. Que celle-ci naisse durant l’écoute est inévitable mais la métaphore n’est pas imposée et jamais sa musique n’est paysagée. Le minimalisme de ses compositions, associé à un son plutôt aride, laisse peu de marge pour la manœuvre d’imagination, quand le son et son agencement ne sont pas simplement à observer pour leur qualité physique. La nouvelle œuvre de Kozo Inada, qui marque la renaissance du label Sonoris, est un des plus beaux dossiers de son catalogue des constructions minimales. Plusieurs couches de sons, d’extraction symphonique, sont utilisées en boucles, aux ressorts épiques comme sur le premier morceau ou, plus loin, dans un registre clair obscur. Lumière et eau, lumière dans l’eau, cet instant de naissance de la mélodie – jamais vraiment accomplie – est comme la mise en suspens du temps dans certains rêves. Flottement et diffraction, la beauté est d’avant l’expression verbale, linéaire, narrative, c’est-à-dire ici de la réalisation mélodique. L’harmonique capturé est confronté à ses pairs, autour desquels il ondule, dans un ballet de reflets vibrants, de cordes en flux. Quand la phrase semble affiner son ébauche vers la mélodie, son environnement se fait plus blanc, dans un geste d’héritage industriel, happant son effort dans le tourbillon de la manipulation. D’autres auparavant, dont Kozo Inada se fait héritier, comme Riley ou Ligeti, ont montré dans leur répétition, dans leur superposition, ce moment de formation, d’extraction de l’émotion musicale hors de la masse. Fantôme d’une naissance symphonique, j[ ] est la préparation utérine de son langage, sortie patiente de l’indifférencié, comme lettre par lettre. D.B.
D.B.