Ant-Zen
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Le chemin parcouru par Ab Ovo, sur six albums, paraît déjà important, parce qu’il a traversé plusieurs paysages. On se rappelle la rupture opérée après le deuxième disque, Strates, vers une musique plus électronique et plus rythmique. Elle avait profondément marqué l’univers du duo et, sans lui ôter ses qualités organiques, l’avait extrait de sa bulle d’éternité, protégée par les nappes, les samples naturalistes et le piano, pour le séculariser dans un bain électro ambiant à rapprocher de plusieurs productions U-Cover. La liberté de mouvement s’était peut-être parfois faite au détriment de l’apesanteur. Mouvements, c’est précisément le thème choisi par J. Chassagnard et R. Baillet (qui, rappelons-le, composent séparément) pour leur nouvel album que l’on peut entendre comme la réconciliation, ou plutôt la mise en équilibre de deux tendances qui marquent le relief dans leur musique depuis quelques années. Impossible pour eux deux d’ignorer la méditation, impossible non plus de se passer désormais, ou bien pour quelques minutes, des rythmes vissés, mid-tempo, hop, mécanisés ou évanescents, dont ils ont pu s’imprégner au contact du compagnon de longue date Mimetic par exemple. Mouvements marque l’harmonie comme jamais avant de ces directions, l’un amène l’autre, et c’est souvent affaire de naissance, d’épiphanies dans les morceaux qui composent le disque. Comme une fleur qui éclôt et qui du duvet chiffonné laisse peu à peu apparaître la géométrie de son pliage, les actions patientes des nappes et des samples, fluant et s’humidifiant de piano, prêtent, à force de respiration, l’espace aux ponctuations percussives qui rapidement se font structure, ossature électro dans les déclinaisons citées. Celles-ci s’adaptent au fin dessin annoncé par les manipulations d’harmoniques et de vagues lumineuses, et c’est avec celles-ci, pour celles-ci, que se poursuit la savante construction. Et lorsque l’ordre d’apparition s’inverse, c’est avec autant de délicatesse que les souffles épousent la forme amorcée, comme sur le morceau Diaclase, que l’on peut entendre comme un hommage à Vromb. Personne n’est une île et il a bien fallu aux musiciens adopter le rythme qui les avait décidément séduits. Mais la nature est profonde qui s’insinue comme le bras de rivière condamné par le remblai, patient jusqu’à retrouver l’affleurement qui le fera courir sur les galets désormais mis en rangs. D.B.
D.B.